Grande autonomie et faible charge : le défi des soldats modernes
Le poids porté par un soldat est un paramètre fondamental. Un équipement lourd sur de longues périodes entrave la mobilité et accroît la fatigue, ainsi que les risques de blessure. Or, à mesure qu'il se modernise, le matériel militaire exige de plus en plus de batteries.
En 2001, le Conseil scientifique de l'armée américaine a recommandé de limiter à 22 kg par personne le poids de l'équipement de base, gilet pare-balles, armement et batteries inclus. Pourtant, en Irak et en Afghanistan, un soldat américain type portait couramment 27 à 45 kg – et la plupart du temps sous une chaleur écrasante.
Selon l'hebdomadaire Jane’s Defence, les soldats britanniques déployés en Afghanistan portaient des charges encore bien plus lourdes – jusqu'à 63 kg de matériel, soit plus du double de celles de leurs prédécesseurs pendant la guerre des Malouines au début des années 1980. Conséquence : de nombreux vétérans souffrent de problèmes de dos, de lésions musculaires et osseuses, ou encore d'arthrite.
Hormis l'armement, l'équipement de protection et tout autre matériel spécifique nécessaire à la mission, tout ce que porte un soldat doit lui permettre de répondre au moins à l'une des quatre questions suivantes : Où suis-je ? Où sont les positions amies ? Où sont les positions ennemies ? Quelle est ma mission ?
Un équipement multiple
Un paquetage classique comprend donc GPS et cartes (en général téléchargées sur une tablette spécifique), radio à courte portée, téléphone satellite pour les communications longue distance, dispositif de vision nocturne, détecteurs chimiques et autres accessoires, dont certains seront laissés sur le terrain pour suivre les mouvements ennemis.
Tous ces appareils nécessitent des batteries, ce qui alourdit l'ensemble. Lorsqu'elle évalue le poids d'une batterie, l'armée recherche le meilleur ratio wattheures par kilogramme (Wh/kg) possible.
Un soldat doit souvent prévoir plusieurs batteries car si certains appareils peuvent fonctionner avec le même modèle, ce n'est pas toujours le cas. Comme toute autre organisation moderne, l'armée doit aussi composer avec des technologies plus anciennes. Tout appareil transporté par un soldat peut avoir été ajouté à son équipement à différents moments, et donc nécessiter une batterie qui soit incompatible avec le reste.
Un nouvel accessoire ajouté à un fusil peut nécessiter une batterie dédiée, impliquant de modifier l'arme ou de relier celle-ci par câble à une batterie que le soldat doit porter sur lui. Cette batterie pourrait être à usage multiple, comme la BB-2590, conçue il y a plus de 40 ans pour alimenter une radio portable, et qui compte aujourd'hui plus de 50 utilisations possibles.
L’électrochimie de la batterie rechargeable BB-2590 a évolué, passant de l'association initiale plomb-acide au nickel, puis au lithium-ion (Li-ion) actuel. Même si sa composition a changé, le modèle de batterie actuel est toujours en mesure d'alimenter cette même radio des années 1970.
Des contraintes complexes
Les fabricants de batteries tels que Saft contribuent, à leur échelle, à alléger la charge d'un soldat en mettant au point de nouveaux modèles, avec des formules et des composants de nouvelle génération. La dernière version Saft de la BB-2590, par exemple, la BB-2590HC/U, offre un ratio de 187 Wh/kg, par rapport aux 127 Wh/kg de la précédente version.
Les batteries à usage militaire répondent à de nombreuses contraintes. Elles doivent pouvoir supporter les vibrations inhérentes aux tirs et celles des différents véhicules qu'un soldat est susceptible d'emprunter. Chutes, chocs, radiations, températures extrêmes, sable, poussière, moisissures et immersions dans l'eau (jusqu'à 30 mètres pour les Navy SEALS) : l'ultra-résistance est de rigueur.
La plupart des corps d'armée mènent des programmes de modernisation afin d'équiper les soldats avec du matériel de pointe, de consolider leurs besoins en énergie et d'alléger leur charge. Le programme français FELIN – Fantassin à équipements et liaisons intégrés – est l'un des plus avant-gardistes du monde. La première phase a été lancée en 1996 et son déploiement en 2009. Initialement l'objectif de charge pour chaque soldat était de 25 kg – en incluant l'armement, les munitions et suffisamment de nourriture, d'eau et d'énergie pour 24 heures. Mais le programme a été récemment revu dans le but de réduire davantage ce poids.
Chaque système FELIN coûte environ 26 000 €. En assurant une interopérabilité maximale entre chaque composant, ce type de programme permet d'alléger le poids total de l'équipement, notamment par la rationalisation du nombre de modèles de batterie nécessaires. Le système FELIN fonctionne à l'aide de deux batteries Li-ion rechargeables et les véhicules militaires français sont équipés pour permettre aux soldats de les recharger.
C'est un processus sans fin : tout nouvel appareil technologique représente autant de poids supplémentaire, sans parler de l'énergie nécessaire pour l'alimenter, ce qui implique d'être encore plus sélectif quant à l'équipement type. Cet équipement est porté par un être humain qui a ses propres limites, et nous avons en permanence cette contrainte à l'esprit lorsque nous développons nos batteries destinées aux militaires.