L’Ouessant fait de la résistance
L’armée, comme le ferroviaire, avait besoin de sources d’énergie portables et fiables. Saft a travaillé dès les années trente pour lui fournir des batteries, concevant notamment un modèle pour les sous-marins.
Dès les années trente, Saft commence à travailler pour l’armée, ce qui conduira la société à fournir des batteries pour les sous-marins à la marine. De nombreuses avancées technologiques lui permettent, à cette époque, d’améliorer ses produits. Ainsi, dès 1925, la société produit des batteries avec plaque négative au cadmium qui dans certaines applications remplacent avantageusement celles au fer. En 1928, les brevets Edison tombent dans le domaine public : Saft peut dès lors proposer des batteries à plaques positives tubulaires, plus performantes.
A partir de cette technologie, Saft met au point pour l’armée une batterie de démarrage qui, après des essais concluants, doit équiper tous les véhicules de combat. Puis elle reçoit la commande, début 1934, d’une batterie alcaline nickel-cadmium de grande capacité pour sous-marin. Dès la fin 1934, les premiers essais sont concluants. Une batterie de 480 éléments fut commandée en 1936 pour l’Ouessant, alors en construction.
Cette batterie, note un compte rendu officiel des essais, était fin prête lors de l’entrée en service actif du sous-marin. Elle présentait un grand intérêt pour la marine, du fait « d’un faible dégagement d’hydrogène, d’une bonne endurance en plongée et d’une grande facilité à maintenir l’isolement électrique ». En fait, cet accumulateur a multiplié par quatre l’autonomie du Ouessant comparé aux trois premiers sous-marins français. Aussitôt, une nouvelle commande est passée, cette fois pour le sous-marin Roland-Morillot. La nouvelle batterie est livrée à Cherbourg en 1940.
L’Ouessant effectue plusieurs patrouilles en Atlantique, au large des Etats-Unis et des Antilles. En juin 1940, pendant la « drôle de guerre », le navire est immobilisé à Brest pour un grand carénage. Devant l’avancée rapide des armées allemandes, la décision est prise de le saborder. Mais il s’agit du début d’une véritable odyssée pour cette unité. L’armée allemande le relève et le remorque jusqu’à Bordeaux en 1942, pour s’en servir comme centrale électrique. Il est à nouveau sabordé à Pauillac en 1944. Renfloué une nouvelle fois en 1948, il est cette fois transformé en releveur d’épaves, avec l’appoint d’un autre bâtiment, l’Agosta, remorqué en Gironde en novembre 1947.
Le Roland-Morillot fut pour sa part détruit sur sa cale de construction alors qu’il était aux trois-quarts construit.
Une longévité peu commune
L’Ouessant séjourna donc dans la rade de Brest, par 15 mètres de profondeur, jusqu’en 1942, date de son renflouement. La marine allemande, jugeant que la batterie était inutilisable, la céda à Saft.
Malgré un séjour de dix-huit mois dans l’eau de mer, la totalité des plaques de la batterie put être traitée et réutilisée pour la fabrication courante ! C’est dire la qualité et la robustesse de cette première batterie.
Saft travaille encore aujourd’hui sur des batteries pour la propulsion de sous-marins mais à base de la technologie lithium-ion ; plus performantes elles équipent non seulement des sous-marins mais aussi d’autres navires, civils ou militaires.
La deuxième guerre mondiale a aussi eu des effets sur l’usine de Romainville de Saft. Celle-ci fut fermée, avant de rouvrir en septembre 1940 sous le contrôle d’un commissaire allemand.
Dans le même temps, Saft s’installe près d’Angoulême, à Saint-Cybard, et ouvre une nouvelle usine dans d’anciens ateliers textile. Cette nouvelle unité de production, spécialisée dans les piles militaires compte jusqu’à 600 employés dans les années 60. Elle est restée active jusqu’en 1984.